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Tout savoir sur la diète cétogène
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Auteur(e) Jean-Philippe Morin

Tout savoir sur la diète cétogène

La nutrition est une science relativement jeune et plusieurs approches sont en vogue présentement : les diètes faibles en glucides, le cyclage des glucides, le jeûne intermittent, et j’en passe. Une chose est certaine, il n’existe pas d’approche unique qui conviendra à tous les types morphologiques, ainsi que tous les objectifs. Bref, l’individualisation est la clé.

 

Article tiré du webmagazine FD Fitness

 

Aujourd’hui, nous nous intéresserons plus particulièrement à la diète cétogène qui est un des sujets de l’heure en nutrition, étant donné que des recherches récentes s’intéressent à son utilité pour combattre ou contrôler certaines maladies et conditions médicales. Nous allons d’abord définir ce qu’est une diète cétogène et démystifier la cétose.que mécanisme et nous intéresser à plusieurs questions sous-jacentes.-

C’est quoi une diète cétogène?

L’alimentation cétogène fait partie de la famille des diètes strictes très faibles en glucides. Le nom cétogène provient de l’appellation « corps cétonique ». Essentiellement, elle est composée d’environ 40g de glucides nets par jour, une quantité modérée de protéines et une bonne dose de bons gras. L’objectif premier de cette approche est de fournir assez peu de glucides à l’organisme pour qu’il se tourne vers une énergie alternative : produire des corps cétoniques à partir de molécules de gras. Il est à noter que l’adaptation à la diète peut prendre plusieurs semaines, voire des mois. Avec le temps, l’adaptation physiologique sollicitée sera de plus en plus efficace.

La cétose, c’est quoi?

La cétose est un processus d’adaptation naturel du corps qui se produit lorsque l’on fournit au corps en deçà de 40g de glucides par jour pendant 3 ou 4 jours. Il faut également contrôler l’apport en protéines pour assurer le maintien de la cétose, puisque l’organisme a la capacité de synthétiser du glucose à partir d’un excédent de protéines par la néoglucogenèse. C’est donc dire que le pourcentage des calories allouées aux gras doit être très élevé. Comme le cerveau peut se nourrir uniquement de glucose ou de corps cétoniques, les mitochondries des cellules hépatiques (cellules du foie) commenceront à fabriquer des corps cétoniques pour pallier l’absence de glucose en quantité suffisante. Ces corps cétoniques, au nombre de trois, se nomment acétylacétate, acétone et acide bêta-hydroxybutyrique.

Par manque d’information, les gens vont souvent associer la cétose avec une condition dangereuse nommée l’acidocétose diabétique. L’acidocétose diabétique ne se produit pas chez les individus en santé et serait un dérèglement qui pourrait se produire chez des diabétiques de type 1. La production d’insuline étant nulle chez les individus diabétiques insulinodépendants, le sucre sanguin devient très élevé et n’est pas réabsorbé pour produire de l’énergie. De plus, le corps se met à dégrader des gras pour produire des corps cétoniques, ce qui détruit l’équilibre chimique du sang[1]. La cétose est, quant à elle, une adaptation normale du corps qu’un individu en santé pourrait maintenir sans danger.

Détails plus techniques sur la cétogenèse

La cétogenèse débute avec un changement au niveau de la sécrétion des enzymes pancréatiques. Lorsque la disponibilité des glucides est faible, le niveau d’insuline est très faible dans le sang également. C’est alors que le glucagon, l’hormone hyperglycémiante antagoniste à l’insuline va enclencher le déversement d’acides gras dans la circulation sanguine. Ces acides gras vont infiltrer le plasma et se diriger notamment vers le foie. Dans cette condition, la concentration de malonyl-CoA, le substrat de la synthèse (formation) d’acides gras, va chuter, car il y aura une inhibition du système glycolytique (le système qui utilise les glucides pour faire du glucose). Cette soudaine chute va activer la carnitine acyltransferase I qui va rendre possible le déplacement des acides gras à chaîne longue jusqu’aux mitochondries des cellules du foie qui vont être en mesure de rapidement les oxyder pour former des corps cétoniques[2]. Des enzymes sont aussi impliquées dans le processus, mais je vous épargne la description des grands noms scientifiques.

La diète ressemble à quoi concrètement?

En premier lieu, je préfère y référer en tant « qu’alimentation » cétogène. Cette terminologie sous-entend moins qu’il y a restriction calorique, car ce n’est pas inhéremment le cas. L’alimentation cétogène est dite élevée en gras, modérée en protéines et très faible en glucides. Très faible en glucides, puisque nous voulons épuiser les réserves de glycogène musculaire et hépatique pour que le corps se tourne vers un « quatrième macronutriment », les corps cétoniques.

Les glucides composent donc 5 à 10% du plan alimentaire, jusqu’à concurrence de moins de 50g de glucides nets. Les protéines doivent être modérées (20-25%) puisqu’un surplus notable en protéines rendrait possible la création de nouvelles molécules de glucose par le processus de néoglucogénèse. Normalement, on ne se situe pas au-delà de 1,5-2g/kg de poids du corps avec ces données. Cela devrait nous donner un ratio gras/protéines-glucides d’environ 4 pour 1. Les gras constituent donc la majorité de l’apport calorique, soit 70-80%. Il est important de savoir que puisque les hydrates de carbones (glucides) sont très restreints, il faudra remédier à la perte en eau en maintenant une bonne hydratation, en utilisant des électrolytes et certains sels (sel rose, sel de mer).

 

Les gras constituent donc la majorité de l’apport calorique, soit 70-80 % !

Quels aliments se retrouvent dans un plan alimentaire cétogénique?

Glucides (fruits et légumes)

Au niveau des glucides, comme c’est très restreint, il faut s’en tenir à quelques petits fruits fibreux à l’occasion (ex : quelques framboises, quelques bleuets). Les légumes verts tels que les artichauts, les épinards, le chou vert frisé, le brocoli, le céleri, les asperges sont vos alliés dans cette situation étant donné que 400 grammes de légumes de couleur pourraient suffire pour vous sortir de la cétose.

Viandes et produits laitiers

Au niveau des viandes, il est préférable d’aller vers les coupes les plus grasses possibles. Ce faisant, puisque les pathogènes des animaux malades se retrouvent dans les graisses, il serait plus judicieux d’aller vers le bœuf nourri à l’herbe dans le cas des viandes rouges. Les poissons gras tels que les sardines et le saumon sauvage, les huîtres, les œufs, le bacon biologique sont aussi des options intéressantes. On accompagne ces viandes de sources de fibres et d’autres graisses comme l’huile MCT, l’huile d’olive extra vierge, le beurre… Au niveau des gras, on retrouvera beaucoup d’huiles ajoutées (coco, olive), de la crème, crème de coco, du fromage feta ou parmesan, des avocats… Les produits laitiers ne sont donc pas proscrits à moins d’intolérance.

 

 

Comment savoir qu’on est en cétose?

La concentration sanguine des corps cétogènes doit être mesurée à jeun le matin. Cela peut se faire avec la piqûre d’un doigt ou avec des bâtonnets pour en mesurer la concentration urinaire. Entre 0,5 et 1,5 mmol/L, on considère qu’il s’agit d’une cétose légère, alors qu’entre 1,5 et 3 mmoL/L[3], on parlerait d’un stade de cétose optimal.

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Les applications médicales

Au départ, l’alimentation cétogène a été étudiée en tant que remède aux convulsions chez des gens épileptiques. Les premières recherches à ce sujet remontent aux années 1920. En fait, il s’avèrerait que l’état de cétose serait environ 6 fois plus puissant que n’importe quelle médication anticonvulsivante sur le marché pour freiner les convulsions. Les recherches récentes s’intéressent à diverses maladies métaboliques telles que le diabète de type 2 et le cancer.

En fait, dans la diète keto, on coupe drastiquement dans nos glucides, donc d’emblée il est possible de faire le lien avec la sensibilisation à l’insuline. Ce type d’alimentation met notre corps dans une situation où très peu d’insuline est sécrétée, donc c’est une méthode possible pour améliorer un état de résistance à l’insuline. Cependant, si vous êtes un diabétique de type 2, je vous conseille vivement de consulter un professionnel en nutrition avant de tenter de l’appliquer.

Les chercheurs spécialisés en alimentation keto vont aborder le cancer en tant que maladie métabolique.

 

En fait, lorsqu’il y a présence d’un cancer, c’est que le corps produit lui-même des cellules défectueuses. Ces cellules cancéreuses anormales ont besoin d’un afflux de glucose pour subsister[4]. La diète cétogène permettrait alors de fournir une énergie alternative pour les cellules saines, alors que les cellules malignes, dont les mitochondries sont défectueuses, ne sont pas en mesure de se nourrir de corps cétoniques. Il s’agit là d’une percée intéressante dans la recherche sur le cancer. Toutefois, M. Dominic D’Agostino a fait beaucoup de recherche à ce sujet et il souligne que dans le cas de cancers tels que la leucémie ou le cancer des testicules, il serait bien difficile de se passer des traitements de chimiothérapie conventionnels[5].

Récemment, des recherches se font sur l’impact que pourrait avoir la diète cétogène pour contrer l’Alzheimer. Il s’avère que cette condition médicale est une forme de résistance à l’insuline. D’ailleurs, dans certaines références, on en parle en tant que diabète de type 3[6]. Grosso modo, la résistance à l’insuline sur une longue période de temps fait en sorte que les cellules nerveuses qui demandent du glucose deviennent résistantes à l’insuline  et se désagrègent, par manque de carburant. En ce sens, la diète keto permet la sensibilisation à l’insuline et l’utilisation de corps cétogènes pour ralentir ce désordre. D’autres études se concentrent également sur le cas de l’autisme, de la maladie de Parkinson et de la sclérose latérale amyotrophique, afin de savoir quels pourraient être les effets de cette approche alimentaire dans ces cas précis.

À qui ça s’adresse? À qui ça ne s’adresse pas?

Ça peut s’adresser à plusieurs groupes de personnes, cependant la nature drastique du plan alimentaire fait en sorte que ça ne fonctionnera sans doute pas pour tous. Cette diète peut être intéressante pour des gens qui veulent faire une perte de gras importante, pour des athlètes de figure en préparation de compétition, ou tout simplement pour des sportifs désireux d’améliorer leur sensibilité à l’insuline et leur concentration. Lorsque le mécanisme de la cétose gagne en efficacité, l’augmentation de la concentration est généralement notable, cependant il se peut que les premiers temps soient ardus.

La diète peut également être intéressante pour une population vieillissante puisque la tolérance aux glucides diminue avec l’âge. D’ailleurs, dès l’âge de 35 ou 40 ans, des cellules précancéreuses peuvent être présentes chez bon nombre d’individus (NE PANIQUEZ PAS!). Essayer la diète keto pour freiner leur développement pourrait alors être intéressant.

Pour terminer, ça ne s’adresse peut-être pas à des gens qui vivent présentement de l’anxiété ou qui ont un cortisol élevé. L’adaptation à la diète prend un certain temps et la réduction importante des glucides pourrait provoquer des effets indésirables durant ce laps de temps. Autrement, sans contraintes métaboliques ou problèmes au niveau du foie, des reins ou du pancréas, cette diète pourrait être viable pour environ 40% des gens. Vous retrouverez un lien vers les conditions spécifiques qui posent un problème pour l’adoption d’une alimentation keto dans la section Q&A (en anglais seulement).

Questions des membres (Q&A)

Q : Est-ce applicable pour tous les body types et personnalités?

A : L’adaptation à l’alimentation cétogène est un peu plus difficile pour les femmes selon Dominic D’Agostino. Les réactions diffèrent et elles semblent réagir davantage aux baisses de sucre sanguin. L’alimentation cétogène n’est pas une one-for-all plus que d’autres types de diètes et 25 à 33% des personnes vont avoir de la difficulté à s’y adapter, toujours selon M. D’Agostino[7]. Il est peut-être un peu tôt pour se prononcer et généraliser sur la possibilité de l’appliquer à des types morphologiques ou des profils neurologiques. Je crois que si une personne a des bonnes raisons de l’essayer, le mieux est de tenter l’expérience et de juger si ça fonctionne pour elle.

Q : Comment ça fonctionne au niveau glycogène?

A : L’organisme va utiliser très peu de glycogène. Il y a formation d’ATP à partir du métabolisme des corps cétoniques. Cette adaptation physiologique s’améliore au fil du temps.

Q : En combien de temps peut-on tomber en cétose? Est-ce qu’un repas triche nous sort de la cétose? Est-ce le même processus pour y retourner?

A : Il faut d’abord que le corps vide ses réserves de glycogène. On peut parler de trois ou quatre jours. Un repas triche haut en glucides ferait tomber la cétose, effectivement. Pour y retourner, il faudrait réduire les glucides à nouveau pendant un bout de temps. Le temps nécessaire pour retomber en cétose est plus court chez les gens habitués ayant maintenu la cétose un certain temps.

Q : Est-ce que ça peut affecter négativement le métabolisme à long terme?

A : Non, à moins que ce soit accompagné d’un déficit calorique étendu sur une longue période.

Q : Ce régime affecte-t-il tous les sportifs?

A : Le régime ne semble pas nuire aux athlètes qui performent dans des sports en aérobie. Il n’est cependant peut-être pas optimal pour les sports explosifs du type anaérobie. L’alimentation cétogène pourrait être très intéressante pour des nageurs puisque qu’elle semble améliorer considérablement la capacité à résister à l’hypoxie, et donc une augmentation marquée de la capacité à maintenir son souffle est possible[8].

Q : Peut-on modifier ce genre de diète avec plus de glucides péri-entraînement? Est-ce nuisible au niveau de la performance?

A : Très peu, mais c’est possible de concentrer les glucides intra ou post-entraînement. Sinon, j’irais peut-être vers une diète faible en glucides avec un supplément de corps cétoniques exogènes pour profiter des bénéfices. Il est également possible d’adapter la diète avec des journées de refeed, mais cela implique qu’on sorte de la cétose pendant un certain temps, à intervalle régulier.

Q : N’est-ce pas trop gras comme régime?

A : À moins d’avoir une pathologie ou une condition de santé qui nuit à la digestion et l’absorption des lipides, non. Sans condition médicale connue, seul un bilan sanguin permettra de déterminer s’il y a dyslipidémie (anormalité du profil des lipides sanguins) suite à l’adoption de la diète. Une élévation légère du LDL (mauvais cholestérol) ne serait pas problématique sauf si d’autres marqueurs comme les triglycérides élevés et une baisse du HDL (bon cholestérol) apparaissent. Les références contiendront une liste exhaustive de contre-indications[9].

Q : Il y a plein de sortes de diètes à la mode, ce serait bien de les différencier.

A : Sans trop m’étendre parce qu’il y en a plusieurs et que le sujet du jour est bien précis, certaines diètes populaires sont le paléo (se rapprocher de l’alimentation de nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, peu ou pas de produits transformés, alimentation animale et végétale), le carbs cycling (inclure des journées plus hautes et basses en glucides dans son plan), le carbs backloading (concentrer les glucides majoritairement en fin de journée), le jeûne intermittent (utiliser une fenêtre de jeûne de 12 à 16 heures dans la journée, nuit incluse), les diètes végétariennes et végétaliennes et j’en passe.

Q : Est-ce bon pour les adolescents qui s’entraînent et qui ont un problème d’hypercholestérolémie causé par la médication?

A : La première question que je me poserais ici concerne la motivation de le faire et l’utilité de vouloir adopter ce régime parce que c’est très strict, donc ça peut être une barrière pour un adolescent si la discipline n’y est pas. Pour l’hypercholestérolémie, il n’y a pas de contre-indication pour la consommation de lipides, cependant seul un bilan sanguin permettra de détecter des anomalies probables à la suite de l’adoption du régime. Des triglycérides élevés après un moment seraient signe d’une mauvaise adaptation.

Q : Les corps cétoniques en supplément, est-ce de la triche? Est-ce que ça fonctionne comme ils le disent?

A : Est-ce que c’est de la triche? Non. Est-ce que ça fonctionne comme certains le disent? Non. Ces suppléments sont des ketone salts, comme le BHB salt, un sel de bêta-hydroxybutyrate qui en effet va faire augmenter les corps cétoniques dans le sang[10]. Cependant, ces suppléments ne font pas tomber en cétose directement comme certains le font croire. C’est idéal lorsqu’il y a une restriction des glucides quelconque et que l’alimentation elle-même favorise la cétose. Ces sels sont aussi intéressants pour les périodes de préparation physique lorsque les entraînements sont difficiles et les calories sont très restreintes. Les ketone esters, qui sont plus au stade expérimental, peuvent faire augmenter la concentration sanguine de corps cétoniques à des niveaux qui s’apparentent à un état de cétose pour 8 ou 10 heures, mais je ne pense pas que ça fasse automatiquement des corps cétogènes l’énergie préférentielle du corps.

Alors voilà. J’espère avoir pu vous éclairer un peu au sujet de ce type de diète.

Malgré le volume de l’article, nous n’avons qu’effleuré la surface sur certains points afin d’accorder plus d’attention aux détails les plus pertinents et donner une vue d’ensemble. Sachant maintenant qu’il s’agit d’un sujet hautement complexe, je vous invite à me poser vos questions, s’il y a lieu!

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Jean-Philippe Morin

Kinésiologue


Sources

[1] http://www.webmd.com/diabetes/type-1-diabetes-guide/ketoacidosis

[2] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/6122545

[3] https://www.dietdoctor.com/lose-weight-by-achieving-optimal-ketosis

[4] http://www.ketogenic-diet-resource.com/cancer-diet.html

[5] https://tim.blog/2015/11/03/dominic-dagostino/

[6] http://www.ketogenic-diet-resource.com/alzheimers-disease.html

[7] https://tim.blog/2016/07/06/dom-dagostino-part-2/

[8] https://tim.blog/2015/11/03/dominic-dagostino/

[9] http://www.ketogenic-diet-resource.com/support-files/who-should-not-follow-a-ketogenic-diet.pdf

[10] https://tim.blog/2016/07/06/dom-dagostino-part-2/