Être en arrêt de travail pour une condition psychologique | FD Fitness consultant
Être en arrêt de travail pour une condition psychologique
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Auteur(e) FD Fitness

Être en arrêt de travail pour une condition psychologique.

Mieux comprendre le processus d’invalidité et savoir quoi faire pour favoriser son rétablissement.

Je suis dans le monde de l’invalidité depuis presque 6 ans maintenant et dans mon nouveau rôle depuis presque 3 ans. Je reçois des dossiers de personnes en arrêt de travail et je les rencontre pour voir comment ils vont, où ils sont rendus dans leur rétablissement et ce que je peux faire pour les aider à reprendre le travail. J’adore ça, mais ce n’est pas toujours facile. La plupart des gens que je rencontre sont en arrêt de travail pour une condition psychologique; trouble de l’adaptation, dépression majeure, trouble d’anxiété généralisé, trouble bipolaire, trouble de personnalité limite, douleur chronique, etc. Je rencontre des gens qui vivent des choses difficiles, que ce soit au travail ou dans leur vie personnelle. Pour certains, ils vivent une invalidité pour la première fois.

En début de carrière, il m’était difficile de comprendre comment une personne pouvait rester en arrêt de travail pendant plusieurs mois, voire plus d’un an! Avec les années et un peu de recul, j’ai compris quelque chose. Les gens qui vivent un premier arrêt de travail, peu importe la raison, ne savent pas comment réagir à cette situation, puisqu’il s’agit souvent d’une première fois qu’ils sont en invalidité. Il n’y a pas de guide détaillé de ce qu’il faut faire lorsque survient l’invalidité. C’est donc l’objectif de cette chronique : mieux comprendre le processus d’invalidité et savoir quoi faire pour favoriser son rétablissement.

Laissez-moi vous raconter l’histoire de Marie (nom fictif) afin de vous permettre de mieux comprendre ce que vit une personne en arrêt de travail. Je suis persuadée que certains parmi vous allez vous y reconnaître ou reconnaître quelqu’un qui vit cela. Si je peux vous sensibiliser un peu à leur situation, j’aurai réussi ma mission.

Marie est une femme de 39 ans qui travaille en tant que conseillère au service client pour une compagnie de télécommunication. Elle s’occupe de prendre les appels des clients et répondre à leurs questions, répondre aux plaintes et vendre des produits connexes. Marie travaille pour cette compagnie depuis environ 7 ans. Elle est mariée et a 2 enfants de 3 et 7 ans. Depuis quelques mois, elle ne se sent pas bien. Elle est toujours fatiguée, elle ne dort pas bien et a moins d’intérêt pour faire des activités avec sa famille. Ainsi, elle a délaissé ses loisirs depuis quelques semaines, elle qui aimait beaucoup aller à son cours de yoga. Un matin, en se rendant au travail, Marie ne se sent pas bien du tout. Son cœur bat vite, elle a de la misère à respirer, elle tremble. Elle se range sur le côté de la rue et se met à pleurer, mais elle ne sait pas pourquoi.

 

Marie décide d’appeler sa patronne pour lui dire qu’elle est malade. Puisqu’elle ne se sent pas bien depuis quelques temps, Marie décide d’aller à la clinique. Après quelques heures d’attente et une rencontre de 3 minutes et quart avec le médecin de garde, elle ressort de la clinique avec un billet médical mentionnant un arrêt de travail d’une durée indéterminée pour un trouble de l’adaptation, une prescription pour des antidépresseurs et des médicaments pour dormir ainsi qu’une référence pour voir un psychologue. Alors, Marie revient chez elle encore plus déprimée et ne comprend pas trop ce qui lui arrive. Elle appelle sa patronne et lui dit qu’elle sera absente du bureau pour quelques semaines. Voici donc en résumé l’histoire de Marie et de ce qu’on sait d’elle ou plutôt ce que les gens autour d’elle savent.

Par contre, voici ce qu’on ne se sait pas :

  • Depuis quelques mois, il y a beaucoup de pression au travail et des coupures d’employés. Marie doit prendre plus de 50 appels par jour, souvent de clients mécontents. En plus, elle doit atteindre ses objectifs de vente, ce qui est presque impossible. Elle se retrouve donc avec une surcharge de travail énorme.
  • En plus d’une surcharge de travail, madame ne sent pas que son travail est reconnu par son employeur et ne perçoit pas un appui de ses superviseurs malgré tout l’effort qu’elle octroie au travail. Ce manque de reconnaissance de son entourage de travail et des clients mécontents, avec qui elle interagit, contribue à son mal être au travail.
  • Depuis quelques mois, Marie s’occupe de son père qui est très malade. Elle est seule à s’en occuper puisque ses sœurs et frères habitent trop loin.
  • Son conjoint est travailleur autonome et travaille plus de 80 heures semaine. C’est elle qui doit s’occuper de presque tout à la maison.

Ces informations, qui ne sont pas généralement évidentes au début, représentent des facteurs psychosociaux importants qui peuvent expliquer non seulement le début de l’invalidité de madame, mais également la persistance de la condition. Ce sont ce genre de facteurs qui s’accumulent et qui expliquent pourquoi Marie, et bien sûr d’autres comme elle, demeurent en situation d’invalidité pendant plusieurs mois, voire des années. Par ailleurs, en plus des facteurs qui mènent à un arrêt de travail, il y a aussi d’autres facteurs qui peuvent s’ajouter pendant l’invalidité (jugement négatif de l’entourage de travail, diminution de l’estime de soi, stress financier, etc.) qui peuvent nuire au rétablissement.

 

Revenons à l’histoire de Marie. Elle sort donc de la clinique et doit maintenant aller à la pharmacie pour chercher ses médicaments, qui risquent d’ailleurs de contenir des effets secondaires dont elle n’est pas encore au courant. Elle doit aussi chercher un psychologue. Marie s’isole et ne parle à personne de son invalidité, parce qu’elle en a honte. Marie est donc chez elle et commence avec la prise de l’antidépresseur qui prend, selon la littérature, 4 à 6 semaines pour agir. Elle doit revoir le médecin dans 4 semaines. Entre temps, Marie est chez elle et ne fait rien. Elle ne sort plus, ne mange presque plus, dort toute la journée. Elle n’a plus de motivation pour faire quoi que ce soit, même pas pour s’engager dans des activités de loisirs qui étaient significatives et importantes pour elle. Bref, Marie devient complètement sédentaire et ne s’occupe plus d’elle, ce qui nourrit le cercle vicieux d’inactivité, de baisse d’énergie et de la diminution de l’estime de soi.

 

Un mois plus tard, elle retourne voir le médecin et sa condition ne s’est pas améliorée. Elle se plaint de fatigue constante, tristesse, manque d’énergie, manque de motivation et d’intérêt, difficulté de concentration et sommeil altéré. Le médecin décide donc d’augmenter la médication et la retourne chez elle et lui donne rendez-vous dans 1 mois. Un mois plus tard, Marie retourne à la clinique, elle ne va pas mieux, le médecin change donc sa médication. Et c’est reparti, Marie en a encore pour au moins 4 semaines et peut-être qu’à la prochaine rencontre, le médecin augmentera la médication, puisque là, il lui a donné la dose minimale et c’est ainsi que ça se passe. À ce stade-ci, Marie est en arrêt de travail depuis presque 3 mois. C’est assez de temps pour qu’une personne se déconditionne complètement. Entre temps, Marie n’a toujours pas commencé à voir le psychologue puisqu’elle n’a pas les moyens de se le payer. Il faut savoir qu’une personne en invalidité reçoit très rarement son plein salaire. Habituellement, les gens reçoivent entre 60-75% de leur salaire. Sans une couverture d’assurance, il devient difficile de se permettre un suivi rigoureux avec un psychologue.

Des personnes comme Marie, j’en rencontre à chaque semaine. Toutes les personnes que je vois ou presque me rapportent ces difficultés vécues par Marie. Comme elle, ils vivent cette situation seul, seul avec un antidépresseur. Et de ce fait, puisque les causes réelles de la dépression ou du trouble d’adaptation ne sont pas résolues, le problème persiste. Le manque de reconnaissance est encore tout aussi présent, la perte de motivation grandit à chaque jour et les solutions sont réduites. Ces délais dans la prise en charge expliquent l’installation d’un cercle vicieux qui nuit en fin de compte au rétablissement. Ainsi, bien que le traitement médical soit essentiel en début de traitement, d’autres interventions doivent suivre pour travailler sur les facteurs qui ont réellement causé l’arrêt de travail (surcharge de travail, manque de reconnaissance, épuisement, etc.). Malheureusement, les personnes en invalidité ne sont pas toujours outillées pour savoir quoi faire ou quelles ressources rechercher, ce qui retarde la reprise de contrôle et prolonge l’arrêt de travail.

L’histoire de Marie en est une parmi des milliers, puisque de plus en plus de personnes se retrouvent en arrêt de travail pour des raisons de santé mentale. Saviez-vous que la dépression sera la 2ème cause d’invalidité à l’échelle mondiale d’ici 2020, tout juste derrière les maladies cardiaques?

 

Voici dons mes quelques conseils :

  • Si vous connaissez une personne en arrêt de travail ou vous vous retrouvez dans cette situation vous-même : la vie continue malgré tout. Essayez de vous lever du lit à chaque matin, de prendre une douche, de mettre des vêtements autres que le pyjama et de déjeuner. Ce n’est pas obligé d’être le déjeuner américain, mais prenez au moins un fruit, une toast, un yogourt, et ce, surtout si vous prenez vos médicaments le matin.
  • Prendre le temps de sortir de la maison, que ce soit pour marcher 5 minutes ou tout simplement s’asseoir sur la galerie. Prendre de l’air frais et un peu de soleil, surtout en période hivernale.
  • Ne pas s’isoler, même si l’envie est présente. Faire l’effort de contacter cette personne avec qui vous pouvez aller prendre une marche, cuisiner un repas simple et parler de tout et de rien. Souvent, ce sont des moments relativement banals avec des proches qui peuvent nous faire sortir de ce cercle vicieux d’isolement et de fatigue. Si vous connaissez quelqu’un en arrêt de travail, appelez-les, prenez de leurs nouvelles, dites-leur que vous êtes là pour eux, sans jugement. On ne sait jamais réellement les raisons qui mènent une personne à être en invalidité et ce peu importe l’invalidité. Essayez d’être là pour vos proches puisqu’ils auront besoin de vous.
  • Faire des activités significatives pour soi-même, des choses qui amènent un sourire et qui sont valorisantes. Misez sur les forces et réaliser les activités qui procurent un plaisir, bien que bref.
  • Faire de l’activité physique! Saviez-vous que l’activité physique à long terme a les mêmes effets que les antidépresseurs? L’exercice augmente la tolérance au stress, améliore l’humeur et diminue les risques de dépression et d’anxiété. Le corps produit une substance chimique, appelée endorphine, qui serait à l’origine des sensations agréables lors et après un entraînement.
  • Maintenir de bonnes habitudes de sommeil avec une routine de sommeil équilibrée. Une sieste peut également être bénéfique, lorsqu’elle ne dépasse pas 30 minutes.
  • Contactez le PAE (programme d’aide aux employés) si vous n’avez pas les moyens de voir un psychologue au privé. Consultez les ressources qui s’offrent dans votre communauté, comme au CLSC.

 

Finalement, voici quelques ressources que vous pouvez consulter si vous avez besoin d’aide ou si vous avez des questions :

  1. fondationdesmaladiesmentales.org/la-maladie-mentale.html
  2. ladépressionfaitmal.ca
  3. http://www.revivre.org/
  4. http://www.lacledeschamps.org/troubles-anxieux-anxiete-montreal/
  5. http://www.cmha.ca/fr/mental_health/la-depression-et-le-trouble-bipolaire/
  6. https://www.aide.ulaval.ca/apprentissage-et-reussite/textes-et-outils/stress-et-anxiete-scolaire/stress-anxiete-et-perceptions-maitriser-les-pensees-toxiques/
  7. http://www.mouvementsmq.ca/sites/default/files/05-coffre-a-outils.pdf

Sirine El- Samra, B.Sc.

Kinésiologue, conseillère en réadaptation et spécialiste en gestion de l’invalidité

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